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Abraham Duquesne, un ancêtre noble ?

En son temps, mon arrière-grand-mère Hermina Duquesne était persuadée que sa famille avait une origine noble, éventuellement liée avec la famille Duquesne de la Vinelle. Avait-elle raison ? C’est ce que j’ai essayé de savoir.

Je connaissais, au début de cette recherche, les ancêtres de mon arrière-grand-mère sur trois générations au-dessus de la sienne :

Louis Duquesne (1791-1858)
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Louis Duquesne (1842-?)
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Victor Duquesne (1874-1942)
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« Mina » Hermina Duquesne (1906-1997)

Il me fallait donc remonter plus loin que ce Louis, originaire de Dunkerque. Des recherches d’actes et de documents divers et variés m’ont permis de retrouver une ou deux générations supplémentaires, avant que, par manque d’archives numérisées, je doive me tourner vers la méthode du coucou : je suis parti à la conquête d’informations sur Généanet. Bien évidemment, ces informations doivent toujours être maniées avec des pincettes, car il n’est pas rare que des erreurs s’y glissent.

Gagné : j’y ai trouvé de nombreuses réponses à mes questions, ou plutôt à celles de mon arrière-grand-mère ! Mais toutes ne sont pas très satisfaisantes. D’une part, il ne semble pas y avoir de lien de parenté entre les Duquesne et les Duquesne de la Vinelle, ces deux familles étant très anciennes (voir sur le site de Thierry Prouvost les ancêtres des Duquesne de la Vinelle) et la seconde ayant été anoblie assez tardivement. Voilà qui est réglé : Bonne-Maman avait tort ! D’autre part, un arbre Généanet indique que les Duquesne de ma famille descendraient d’Abraham Duquesne, marquis et lieutenant général de la Marine française, proche de Louis XIV !

Selon Wikipédia, Abraham « est l’un des grands officiers de la marine de guerre française du XVIIe siècle. Né dans une famille huguenote au début du XVIIe siècle, il embarque pour la première fois sous les ordres de son père, capitaine de vaisseau. Il sert sous Louis XIII pendant la guerre de Trente Ans et se distingue en plusieurs occasions, notamment aux combats de Tarragone et du cap de Gata, mais doit quitter la marine en 1644 après avoir perdu un navire.

Pendant les troubles de la minorité de Louis XIV, il obtient de Mazarin l’autorisation de servir dans la marine royale suédoise, en compagnie de son frère. Il prend part à la guerre de Torstenson qui oppose le royaume de Suède au Danemark et se distingue au combat de Fehmarn en prenant le navire amiral du commandant de la flotte danois Pros Mund. 

Rentré en France, il réintègre la Marine royale et est envoyé en 1669 au secours de Candie, assiégée par les Turcs. Il prend part à la guerre de Hollande (1672-1678) et combat à la bataille de Solebay (1672) et à Alicudi (janvier 1676), mais c’est à la bataille d’Agosta (avril 1676) et à celle de Palerme qu’il se distingue tout particulièrement. Il termine sa carrière avec le grade de lieutenant général des armées navales, freiné dans son avancement par sa religion qu’il refusera d’abjurer malgré l’insistance de Louis XIV et de ses conseillers (Colbert et Bossuet). […] En 1685, il est l’un des très rares personnages autorisé à rester protestant et à pouvoir demeurer en France malgré l’Édit de Fontainebleau, à condition qu’il ne se livre à aucun acte d’allégeance public « à la religion prétendue réformée ». Il demande à émigrer, mais cette faveur lui est refusée, de peur qu’il ne renseigne l’étranger sur l’état des forces navales françaises. […] Une semaine après sa mort, le Roi ordonne que tous ses biens soient mis sous séquestre. À sa veuve on laisse le choix de l’émigration ou de l’abjuration. Cette dernière finit par renier sa foi et peut conserver ses biens. Sur les quatre fils du couple, deux se convertiront au catholicisme, les deux autres émigreront en Suisse. Parmi eux, son fils Henri Duquesne, qui transporte le cœur de son père au temple d’Aubonne, dans le canton de Vaud (Suisse). Ce dernier lui compose l’épitaphe suivante en latin dont voici la traduction :

« Du Quesne fils à son père:
Ce tombeau attend les restes de Duquesne
Son nom est connu sur toutes les mers
Passant, si tu demandes pourquoi les Hollandais
Ont élevé un monument superbe à Ruyter vaincu,
et pourquoi les Français
Ont refusé une sépulture au vainqueur de Ruyter
Ce qui est dû de respect et de crainte à un monarque,
Dont s’étend au loin la puissance,
M’interdit toute réponse ». »

Anobli en 1650 sous le titre de baron d’Indret et en 1682 sous le titre de marquis du Quesne, il prend les armes d’argent au lion de sable, lampassé et armé de gueules.

Voilà un bien illustre ancêtre ! …Sauf que quelque chose me chagrine. Dans l’arbre Généanet dont je parlais,  le nom de l’enfant d’Abraham dont serait issue mon arrière-grand-mère, né en 1635, est inconnu. Comment cela est-ce possible, comment la filiation peut-elle être établie avec certitude dans ce cas ? D’autant plus que dans l’arbre de Wailly et sur Wikipédia, tous les enfants d’Abraham sont nés bien plus tard que cet « enfant inconnu », et celui-ci n’y figure pas. Cela est incohérent… Peut-être ne suis-je pas le descendant d’Abraham Duquesne ? Si je le suis, alors par quelle filiation ? Peut-être le saurai-je un jour…

Un cousin au bagne outre-mer

En 1871, un certain Druenne participe à l’insurrection de la « Commune de Paris ». Il sera ensuite jugé et envoyé au bagne en Nouvelle-Calédonie, avant de rentrer à Paris et d’y commettre un autre forfait. Qui est cet étrange homme ?

Impossible de savoir où Jules César Druenne est né. Seule une indication dans La Gazette des Tribunaux de 1879 laisse deviner qu’il serait né en 1830 (voir tableau). Tout ce que l’on peut savoir de lui, c’est qu’il a eu à plusieurs reprises des démêlés avec la justice. Voici tout ce que je sais à son sujet…

1870 Il est condamné à un mois de prison pour vol. Paris (?) Voir références pour sa condamnation d’octobre 1879.
21-28/05/1871 Il participe à l’insurrection de la Commune de Paris. Paris Wikipedia
1871-1872 Il est jugé pour sa participation à la Commune de Paris, lors du deuxième conseil de guerre permanent du gouvernement militaire de Paris : conseil n°20, dossier n°113, GR 8 J 428. Paris Conseils de guerre et condamnés de la Commune de Paris, p.185
1872  Il est condamné au bagne en Nouvelle-Calédonie suite à sa participation à la Commune de Paris : matricule 2146, cote de référence FR ANOM COL H 78, code de communication FM H78/druennejul. Il est là fait mention d’une déportation simple, et non d’une déportation en enceinte fortifiée – contrairement à ce qui sera expliqué dans les journaux quelques années plus tard ; voir plus bas. Île des Pins, Nouvelle-Calédonie – Archives nationales d’Outre-Mer
– La Commune Vécue, p.408
– Google Maps
Octobre 1879 Ivre, il agresse des agents sur la voie publique, place Cambronne. En conséquence, il est condamné à un mois de prison et cinq francs d’amende. Paris – 31/10/1879, La Gazette des Tribunaux, Paris, p.2 : « Jules César Druenne, quarante-neuf ans, charretier, condamné à la déportation dans une enceinte fortifiée pour faits relatifs à la Commune, et, en outre, en 1870, à un mois de prison pour vol. À dix heures du soir, place Cambronne, il a été arrêté dans un état d’ivresse manifeste, a traité les agents de canailles, d’imbéciles, ajoutant : « Si je vous tenais dans un coin, je vous bourrerais de coups de poing. » Le Tribunal [de police correctionnelle] l’a condamné à un mois de prison pour le délit, et à 5 francs d’amende pour l’ivresse. Il était arrivé à Paris de l’avant-veille. »
– 1/11/1879, Le Figaro, Paris, p.2 : « Autre amnistié. Celui-là s’appelle Jules-César Druenne. Il a été deux fois condamné, d’abord pour vol, et plus tard à la déportation dans une enceinte fortifiée, pour participation à la Commune. Le Tribunal l’a condamné à un mois de prison, pour avoir traité les gardiens de la paix de canailles, d’imbéciles, et les avoir menacés dans les termes les plus abominables. »
– 4/11/1879, Le Gaulois, Paris, p.2 : « Le tribunal correctionnel jugeait, avant-hier, trois autres amnistiés, prévenus d’outrages aux agents. Le premier, Jules Druenne, charretier, a déjà été condamné, en 1870, à un mois de prison pour vol. Après la Commune, il a été condamné à la déportation dans une enceinte fortifiée. Arrêté, l’autre soir, en état d’ivresse, place Cambronne, il a traité les gardiens de la paix de « canailles et d’imbéciles », ajoutant : « Si je vous tenais dans un coin, je vous bourrerais de coups de poing. » Le tribunal l’a condamné à un mois de prison pour outrages aux agents, et à 5 fr. d’amende pour ivresse. »
On le voit, de nombreuses informations restent à découvrir au sujet de Jules. Peut-être l’avenir nous en dira-t-il plus ?

Un brasseur dans la famille

Dans son Histoire de la ville et du port de Brest, Prosper Jean Levôt évoque un certain Druenne, venu s’installer à Brest en provenance de Landrecies pour y produire de la bière au service de la Marine française :

En 1767, Choquet de Lindu, chargé comme ingénieur en chef, et indépendant des officiers du génie de terre, des travaux de la marine, rétablit le quai devant le magasin général, et l’on créa une brasserie près du Moulin-à-Poudre (1), en même temps qu’on préludait par l’installation d’une forge à martinet et d’un moulin à scier les bois, à l’établissement de l’usine de la Villeneuve (Appendice, §15).

En 1762, M. Le Roy, commus dans les bureaux du munitionnaire de la marine à Brest, avait, de l’agrément de M. l’intendant Hocquart, établi à l’anse Saupin, une brasserie où il fabriqua de la bière en vue de la substituer au vin de Saintonge, donné aux équipages pendant l’armement et le premier mois de la campagne. Il ne réussit pas, et en 1768, le ministre lui accorda une indemnité de 3,522 livres en dédommagement de ses pertes. Lorsqu’en 1767, M. de Clugny obtint qu’une brasserie fût faite et desservie au compte de la marine, un brasseur expérimenté, nommé Albert Druenne, vint à cet effet de Landrecies dans le Hainaut. La brasserie fut établie dans l’anse du Moulin-à-Poudre, et on loua, à une demi-lieue de là, une petite ferme où Druenne, qui avait apporté des plants de houblon du Hainaut, le cultiva avec assez de succès pour que, l’année suivante, il obtînt la récolte nécessaire à la fabrication de 900 barriques de bière. La fabrication donna d’abord d’aussi bons résultats que la culture ; mais des abus se glissèrent dans l’exploitation dont le munitionnaire fut chargé pour son compte, à partir du 1er janvier 1775. En 1783, un brasseur, nommé Holizer, fabriqua, d’après un procédé dont il était l’inventeur, 102 pièces de bière anti-scorbutique, et au mois de mars 1791, il offrit d’en fabriquer à 26 livres la barrique. Nous ignorons si sa demande fut accueillie. De nouveaux essais, tentés ensuite, furent promptement abandonnés (LEVOT Prosper Jean, Histoire de la ville et du port de Brest, vol.2).

Cette bière demandée par la Marine royale avait pour objectif, comme on peut le lire sur Le Télégramme, de soigner la syphilis et le scorbut à bord des navires.

Qui est cet homme ? À quel foyer de Druesne appartient-il ? C’est ce que je me suis donné pour mission de découvrir. Commençons par le début, et essayons de nous poser les bonnes questions. Ce texte ne nous dit rien de l’âge d’Albert ; difficile donc, à cette époque reculée qu’est le dix-huitième siècle, de trouver un éventuel acte de naissance. Je me tourne donc vers l’espoir de trouver son acte de décès, ne sachant ni s’il s’est marié, ni si cela se serait produit avant ou après son départ de Landrecies pour Brest.

Mais Brest est une grande ville, avec plusieurs paroisses. Les archives de Brest sont classées en fonction de ces dernières, et je ne sais dans quelle paroisse ou quel village environnant Albert aurait pu être enterré. Me voici donc parti sur Google Maps pour une partie de Geomapping, dans l’espoir de découvrir le quartier ou le village où Albert aurait pu vivre, en supposant qu’il a vécu à un endroit proche de sa brasserie – que j’essaie donc désormais de situer. Je sais, d’après le texte ci-dessus, que la brasserie d’Albert fut établie dans l’anse du Moulin à Poudre, inconnue sur Google Maps – à l’inverse de la rue du Moulin à Poudre. Normal : comme je l’ai appris, l’anse du Moulin à Poudre était un cours d’eau, qui, comme on peut le lire sur Tonnerredezef, est aujourd’hui comblé. Une publication sur la page Facebook des archives de Brest (22 octobre 2015) explique ce qui suit :

La voie que l’on dénomme depuis près d’un siècle et demi rue du Moulin à Poudre n’est, en fait, que le tracé de l’ancienne vallée du ruisseau de Kérinou, où venaient se jeter ceux descendant de Kérigonan, Kérédern, Prat-ar-Raty et Kéranfurust, terminant sa course dans une crique de la Penfeld aujourd’hui comblée. A cette époque, trônait au milieu de la vallée, enjambant ce bras un moulin : «Ar Milin Coz». Il sera acheté le 1er mars 1669 par la Marine à la famille de Portsmoguer, pour y transformer le charbon de bois entrant dans la composition de la poudre à canon. Mal adapté à cette fabrication, du fait entre autres, du faible courant d’eau, il sera revendu à peine un quart de siècle plus tard. Cependant, cette activité aura marqué le lieu de son empreinte. Le nom de «Moulin à Poudre» sera donné aux quelques maisons formant ce hameau, ainsi qu’à l’anse dans laquelle se jettent les eaux ayant activé le moulin.

Au 18ème siècle, le courant de l’eau n’étant pas suffisamment important, plusieurs retenues furent édifiées et l’étang agrandi fut fermé par une large chaussée à écluse. C’est ainsi que le chemin reliant le village de Lanrédec à celui de Traon Quizac fut appelé « rue de la Digue »; ce nom était alors justifié par la retenue qui fermait l’étang alimentant les moulins.

Dénommée rue de Lanrédec le 21 juin 1965 sur toute sa longueur, les édiles lui redonnèrent son nom d’origine « rue de la Digue » sur la première portion côté Moulin à Poudre le 11 mai 1984, pérennisant dans ce secteur où toutes traces d’étangs ou de moulins ont aujourd’hui quasiment disparu, la présence en ces lieux d’une activité meunière diverse autrefois très active.

Les rives de l’anse étaient alors bordées de quais. La Marine y stockait une partie de ses bois. Vers 1765, les hangars de la tonnellerie avaient été édifiés sur la rive nord de l’anse et quelques années plus tard, sur l’autre rive, d’autres bâtiments pour le bois de construction. Le vieux moulin, devenu moulin à malt, s’étoffa par la suite d’une brasserie dont la future porte de l’arsenal pérennise aujourd’hui ce nom. Cette brasserie avait été ouverte en 1767 par la Marine. Avant 1800, la brasserie fut réaménagée comme pouliérie et le nouveau moulin qui l’actionnait encore sera quant à lui, utilisé comme magasin.

En 1849, la Marine vendit à la ville les terrains qu’elle possédait, pour l’édification du futur quartier de l’Harteloire et le déplacement de cette partie des fortifications. Sur la courtine, édifiée à cette époque et qui fermait la trouée de Kérinou en raccrochant les nouvelles défenses de la ville aux fortifications du Bouguen, fut aménagée dans une muraille, une porte avec pont-levis. La route du Moulin à Poudre et la rue de Portsmoguer apparurent. Désormais un corps de garde et un octroi délimiteront le passage de la ville à la campagne. Après 1875, l’anse de la tonnellerie sera en partie comblée et disparaîtra complètement au début du 20ème siècle. En 1910, la porte du Moulin à Poudre sera démolie mais l’octroi, lui, restera en service jusqu’en 1944. Aujourd’hui, l’Arsenal est enfermé. A la porte de la Brasserie qui y donne accès, ont été construits des bâtiments qui épousent à peu de chose près, les contours de ce qui a été l’Anse du Moulin à Poudre, bras de la Penfeld.
Sur le carrefour des rues du Moulin à Poudre, de Portsmoguer et du Bouguen, existent encore aujourd’hui les ruines du corps de garde qui mériteraient bien d’être mises en valeur au même titre que des vestiges de fortifications toujours visibles en ces lieux.

Porte de la Brasserie Brest-resizedporte de la brasserie ancienne-resizedMon cœur n’a fait qu’un bond lorsque j’ai lu la phrase en gras : sans qu’elle soit citée, c’est bien la brasserie de notre Albert dont il est question ! La porte de l’arsenal dont il est question, construite bien plus tard, n’est autre que la Porte de la Brasserie, autrefois appelée « porte du Moulin à Poudre ». Ainsi, l’histoire de cet endroit, à Brest, est donc intimement liée à celle d’Albert Druenne !

Les photos ci-contre représentent respectivement la porte de la Brasserie au siècle dernier (image : Le Bouguen-les Baraques) et actuellement (image : Trainjoël).

Ainsi donc, si l’on considère que la porte de la Brasserie se trouve proche de l’endroit où était réellement établie la brasserie d’Albert, un rapide coup d’œil à un plan des quartiers de Brest restreint les lieux où il aurait vraisemblablement pu habiter aux paroisses de Brest-centre et à Lambézellec, village situé au Nord de Brest. Nous éliminons ainsi potentiellement les quartiers de Recouvrance et de Saint-Pierre. Reste à explorer tous les autres… Il n’est mentionné ni dans le recensement de Lambézellec en 1886, ni dans celui de Brest en 1795-1796, ni parmi les décès de la paroisse Saint-Louis entre 1759 et 1791, ni dans celle de Recouvrance (Saint-Sauveur) (j’ai quand même regardé, au cas où…) entre 1761 et 1791.

C’est là que je suis actuellement bloqué. Sur Geneanet ou d’autres sites généalogiques, je ne trouve rien de concluant, que ce soit au sujet du contexte de naissance ou de décès d’Albert. À quand un déblocage ?

[EDIT : 10/12/2016] La famille d’Albert Druenne est désormais connue ! Il est le fils de Georges Druesnes et d’Anne Lobry, originaires de Bousies, dans l’arrondissement administratif de Landrecies. Albert avait 23 ans lorsqu’en 1747, il se mit au service de la Marine française. Une fois son serviceà Brest terminé, il rentra à Bousies et y épousa Marie Angélique Delfosse le 21 novembre 1758. Étant donné qu’aucun document des archives de Bousies ne mentionne explicitement son voyage vers Brest, il est impossible d’affirmer avec certitude qu’il s’agit bien du même Albert Druenne. Plusieurs indices viennent cependant soutenir la thèse qu’il s’agit bien de lui : son âge à l’époque de la brasserie à Brest, son mariage tardif (pour l’époque), le fait qu’il signe « Druenne » alors que le reste de sa famille signe « Druesnes », et enfin, le fait qu’il soit désigné dans son acte de mariage comme un « marchand de houblon ». Victoire : après des années de recherche, le « mystère Albert Druenne » est enfin éclairci !

Sources

  • LEVOT Prosper Jean, Histoire de la ville et du port de Brest, vol.2 (Le port depuis 1681), Brest-Paris, 1865, p.147, disponible sur Google Books
  • Le Blog de Dom, La Bretagne Brassicole, publié le 8 octobre 2012, consulté le 21 août 2016, disponible en ligne
  • Train Joël, Balade à Brest : les anciennes portes, publié le 7 octobre 2012, consulté le 21 août 2016, disponible en ligne
  • Sophie Mouton, Brest, plateau des Capucins : présentation historique, publié le 19 juillet 2007, consulté le 21 août 2016, disponible en ligne
  • Le Télégramme, La Bretagne, terre brassicole méconnue, publié le 14 décembre 2014, consulté le 21 août 2016, disponible en ligne
  • Tonnerre de Zef, « Île factice » à Brest, publié en septembre 2015, consulté le 21 août 2016, disponible en ligne
  • Page Facebook des archives de Brest, Moulin à poudre ou brasserie ?, publié le 22 octobre 2015, disponible en ligne
  • Le Bouguen – Les Baraques, Le Bouguen… Souvenirs, par Georges Perhirin, publié le 14 mai 2015, consulté le 21 août 2016, disponible en ligne

Sur les traces de mes ancêtres

Le jeudi 21 juillet 2016, j’ai eu la chance de marcher dans les pas de mes ancêtres là où je ne l’avais jamais fait, là où des centaines de Druesne m’ont précédé : Ruesnes et Forest-en-Cambrésis. Si cela fait maintenant plus d’un an que j’ai découvert que c’est à Forest que sont mes origines, c’était la première fois que je m’y rendais « pour de vrai ». Un moment inoubliable ! Et pour cause…

Pour la première fois depuis longtemps, j’ai eu la chance de faire une petite virée d’un soir avec mes parents. Si l’idée de cette escapade dans le Nord trottait dans ma tête depuis longtemps, c’est pourtant presque « sur un coup de tête » que nous avons pris la route pour faire de ce rêve une réalité. Mettant d’abord le cap sur Ruesnes, nous y avons découvert le petit village d’où seraient originaires les premiers Druesne à avoir porté ce nom (voir l’étymologie du nom ici). Là, peu de traces de notre famille ; je m’y attendais, car aucun Druesne de mon arbre n’a vécu bien longtemps à Ruesnes. Nous avons cependant découvert un château en ruines, ainsi que des tombes portant le nom Camaret. Les Camaret auraient-ils un lien avec les de Camaret, originaires du village de Chamaret dans la Drôme provençale, où ma famille part souvent en vacances ? De futures recherches approfondies nous le diront peut-être.

Deuxième étape de notre escapade : Forest-en-Cambrésis. Si Ruesnes n’a pas gardé beaucoup de traces visibles des Druesne, ce n’est pas le cas de Forest, où on les trouve presque à chaque coin de rue ! Ensemble, nous avons été à la découverte de la ferme de la Couronne que mon ancêtre François Simon Druesne donna à son fils Simon, qui immortalisa son passage en gravant ses initiales (S.D.) et celles de son épouse Marguerite Givry (M.G.) dans la pierre de faîte du portail d’entrée de la ferme. On y trouve aussi une pierre commémorative du passage de Jésuites en 1744. L’église du village, rebâtie après 1918 (et dont je parle ici), ne contient plus aucune trace de la tombe de Simon Druesne et d’autres de mes ancêtres qui avaient été enterrés sous le dallage.

Avant de repartir vers la Belgique, sur la proposition de mon père, nous nous sommes rendus au cimetière de Forest, tout proche de la ferme de la Couronne, pour y trouver d’éventuelles tombes de Druesne susceptibles de nous apporter des informations sur l’histoire de la famille. Et comment ! Il y en avait des dizaines ! Armé de mon appareil photo, je circulais donc entre les tombes, appelé de temps à autre par mes parents qui en trouvaient d’autres. Nous entendant parler de Druesne, une dame, de passage dans le cimetière, s’est approchée de nous : « Je suis une Druesne, moi ! », dit-elle. Quelle bonne surprise ! Nous étions donc tombés, par un immense hasard, sur une cousine très éloignée, notre plus proche ancêtre commun étant le fameux Simon Druesne ! Nous avons échangé pendant quelques dizaines de minutes au sujet de nos histoires familiales respectives. Nos contacts échangés, c’est par internet que continuent nos échanges.

Une soirée inoubliable, qui restera longtemps dans les mémoires !

Un ancêtre peintre ?

Il y a quelques semaines, j’ai eu la surprise d’être contacté via ce site par un homme qui me disait avoir en sa possession une aquarelle au dos de laquelle il est écrit « Druenne – Lobbes ». Intrigué, je l’ai contacté à mon tour pour en savoir plus au sujet de cette peinture. Des photos détaillées m’ont permis de découvrir que si l’écriture au dos est de la main de mon grand-père, l’objet lui-même devait, lui, être un souvenir de mon arrière-grand-père Désiré Druenne datant de l’époque de ses études à l’Institut Warocqué de Mons. J’en ai donc conclu qu’il s’agissait probablement d’une peinture de sa main. Sans pouvoir en découvrir plus, j’ai archivé les mails échangés et les photos reçues dans mes archives personnelles.

Quelle ne fut pas ma surprise lorsque, tout-à-l’heure, en triant mes tas de fichiers généalogiques, j’ai retrouvé un brouillon de lettre de mon arrière-grand-père dans lequel il mentionne l’oeuvre ! Cette lettre, écrite à l’institut Warocqué le 30 novembre 1949 à l’occasion des cinquante ans de celui-ci, décrit cette peinture comme une « affiche publicitaire pour le « lancement » du Mercure Déchaîné déposée dans certains cafés et fritures de la ville. [Cette affiche] a été créée vers 26-27 par un Ancien, Marc Vanderborght. [L’affiche] nécessite quelques explications. […] Noire sur fond blanc, [elle] a été inspirée à notre camarade Vanderborght lors d’un de ses voyages en Amérique. Elle symbolise notre Mercure* sur le pont de Brooklyn à la conquête de New York et même de l’Amérique toute entière. Ces affiches sont pour moi des souvenirs non seulement de mon passage à l’Institut, mais aussi de mon camarade Vanderborght, je les confie à votre garde ».

Ainsi, une fois cédée à l’Institut, l’aquarelle aurait circulé de main en main jusqu’au jour où ce monsieur l’acheta dans une brocante à Bruxelles, il y a une vingtaine d’années de cela.

Une jolie découverte, à ajouter à l’histoire familiale !

*Mercure, le messager des dieux grecs, équipé d’un casque et de chaussures ailés, est le symbole de l’Institut Warocqué de Mons (actuellement uMons).

Et si les Communistes arrivaient ?

Désiré Druenne (1904-1950), père de Jacques Druenne

Désiré Druenne (1904-1950)

En mai 1950, mon arrière-grand-père Désiré Druenne (1904-1950) a dû être bien surpris, un soir, lorsque son fils lui posa une question sur l’attitude à adopter quant à l’entreprise familiale si jamais les communistes débarquaient en Europe. Il a alors rédigé une lettre « à détruire ou à mettre au panier » avec beaucoup de soin pour y coucher ses conseils. Il faut croire que mon grand-père ne respecta pas la demande de son père, puisque le document est parvenu jusqu’à moi… Pour mon plus grand bonheur ! Quatre mois plus tard, Désiré était mort…

Et si les communistes… ?

À retenir SVP ou bien à mettre au panier

Quelques notes suggérées par une réflexion de mon fils à sa maman en Mai 1950.

…Si les communistes devenaient les maîtres en Europe occidentale, ceux qui auraient un diplôme resteraient dans leurs occupations ?

Peut-être, à condition d’être des leurs. Et d’accepter de devenir fonctionnaire.

Si les communistes ou du moins leur idéologie devenait d’application chez nous, il faudrait envisager la solution comme suit :

Exclusion totale de la famille parmi l’activité de l’atelier (un citoyen ne peut exploiter un autre citoyen, seule la collectivité peut exploiter les humains au profit de la collectivité). À ce moment, si l’atelier n’est pas supprimé, tu pourras continuer à le diriger soit directement ou avec l’aide d’un commissaire politique qui aura tout à dire. J’ajoute que ta présence sera supportée si tu sais donner à tes gens l’impression que tu es des leurs.

Et si tu es bien imprégné de mes conseils, c’est-à-dire si tu as fait du traçage, si tu es pendant quelque temps sur les machines au point de la connaître et de réellement faire œuvre utile, si tu as voulu apprendre tout ce qui touche à la partie manuelle de l’activité de l’atelier, tu pourras certainement « en cas de panne » être plus près de la masse qu’un type en smokink.

Il y a une autre solution, celle de se sauver à temps – oui, parfaitement. Prendre ici les machines les plus intéressantes, les charger sur un bateau et les expédier au Congo par exemple et s’installer au Congo, pour y faire de la chaudronnerie, de la mécanique, etc. pour les Africains. Pourquoi pas ? Mais la réussite dépendra en ordre principal de l’application du chapitre souligné en rouge.

Je tiens à dire que ces notes m’ont été suggérées par ta réflexion, je ne pense pas que les communistes viendront nous submerger avant 20 ans.

Ton Père

Désiré Druenne

Note dans la marge : J’ai vu une période particulièrement pénible de notre existence, Mai, Juin, Juillet 1940, dans le Tarn et Garonne et la Haute-Garonne, des dessinateurs de grande valeur et des comptables experts rester sans travail, par contre j’ai vu des hommes de métier être embauchés une heure après leur arrivée dans un patelin.

Je trouve émouvant, en ce qui me concerne, de lire, si longtemps après des faits que je n’ai même pas connus, ces lignes sur une époque si grave. J’espère découvrir encore d’autres documents du même type !

Le mois de la femme

En ce mois de la journée de la femme, la généalogiste de la Gazette des Ancêtres propose aux généablogueurs de travailler sur la thématique des femmes dans notre généalogie. J’ai donc choisi les deux femmes [ou plutôt trois, après réflexion] qui, parmi mes ancêtres, m’ont le plus intrigué : Marie Jacquy et Hubine Le Clercq [et tante Marie-Jo].

Une photo mystérieuse

Longtemps, Marie Jacquy a été pour moi une parfaite inconnue. Ce n’est qu’en triant une vieille boîte de photos – j’ai encore des milliers de photos à trier et à numériser ! – que je suis tombé sur une photo de type portait, celles où seul le buste d’une personne est photographié, et imprimé au milieu d’un espace blanc ou ocre. Au verso, de la main de ma grand-tante, une inscription : « Reul – Grand-mère de papa ». Immédiatement, je prends mon ordinateur pour aller voir le nom de cette fameuse grand-mère du papa de ma grand-tante : son nom m’était inconnu ! À cette époque, la famille de ma grand-tante, donc celle de ma grand-mère paternelle, était encore bien peu connue. Je connaissais donc le nom de son fils, mon arrière-grand-père, mais rien ne m’informait sur son nom.

C’est donc motivé par cette photo, par ce visage digne et sérieux, presque austère, que je me suis mis à la recherche d’un couple qui m’était totalement inconnu. Pas facile : je ne parvenais pas à retrouver l’acte de naissance de mon arrière-grand-père, qui n’était pas encore en ligne sur FamilySearch ou les archives de l’État belge. Je ne serais probablement jamais parvenu à trouver si je n’avais pu bénéficier de la précieuse aide d’un groupe de généalogistes dont je fais partie et qui a retrouvé pour moi l’acte de naissance que je recherchais : super, je connaissais enfin le nom de cette mystérieuse ancêtre, Marie Jacquy !

Une femme au joli prénom [peut-être] émigrée

La seconde femme dont je voudrais parler ici porte le joli prénom de Hubine. Elle a vécu d’environ 1508 à 1558 et, si elle est pour moi tellement intrigante, c’est pour une double raison : d’une part, de Couvin en Belgique, elle semble avoir émigré au Royaume-Uni – à Preston, plus exactement. Pourtant, ses enfants, au prénom typiquement anglais, seraient nés en Belgique ! D’autre part, une grande discussion quant à la véracité et aux modalités de cette émigration m’oppose à ma grand-tante (du côté de ma mère, cette fois !), qui étudie la généalogie familiale du côté de ma mère – de manière plus « traditionnelle » toutefois – depuis près de soixante ans.

Une grand-tante méfiante

Elle pourrait bien être, cette grand-tante « Marie-Jo », la troisième femme de cet article. Très méfiante au sujet des « rapaces » et des « carabistouilles » qui semblent, à ses dires, être légion sur internet, elle fait partie, à plus de 80 ans, des rares généalogistes « tout-papier » et sans ordinateur qui existent encore (si, si !). Elle reste néanmoins complètement scotchée par mes découvertes lorsque j’arrive chez elle avec un gros livre issu de Gallica qui raconte l’histoire du village d’où est issue ma famille !

Marie, Hubine, Marie-Jo : trois femmes de ma famille, de mon arbre, que je ne suis pas prêt d’oublier. En ce mois de la journée de la femme, pensons non seulement à elles, mais à toutes les femmes de nos arbres généalogiques, souvent mises de côté mais sans lesquelles aucun d’entre nous ne serait là !

À la recherche du SOSA1000

La numérotation SOSA, vous connaissez ? C’est un système de numérotation des ancêtres directs de la personne dont on étudie la généalogie (appelée « de cujus »). Cette personne porte le numéro 1, son père le double (2) et sa mère le double augmenté de 1 (3). La même règle s’applique pour chaque individu : le père de l’ancêtre 13 portera ainsi le numéro 26 et sa mère le numéro 27. On obtient ainsi une liste continue d’ancêtres. Sur l’idée de Sophie Boudarel, je suis parti à la recherche de mon SOSA1000…

Première chose : qui est mon SOSA1000 vis-à-vis de moi ? 1000 est un nombre pair : il s’agit donc d’un homme – le père du SOSA500, lui-même père du SOSA250, lui-même père du SOSA125. Ce dernier, ou plutôt cette dernière puisqu’il s’agit d’une femme, est la mère du numéro 62, qui est père du numéro 31, lui-même mère du numéro 15 qui est la mère du numéro 7, mère du numéro 3, ce numéro étant celui de ma mère.

Deuxième chose : est-ce que je connais déjà cet ancêtre ? Qui est-il ? Remontons le temps jusqu’à lui…

  • Ma grand-mère maternelle, Cécile Delwiche (SOSA7), est la fille de Blandine Jacob (SOSA15). Cécile est née en 1934.
  • Blandine Jacob est la fille de Maria Devlesaver (SOSA31). Blandine est née en 1899 et est décédée en 1984.
  • Maria Devlesaver est la fille de Jean-Baptiste Devlesaver (SOSA62). Maria a vécu de 1865 à 1938.
  • Jean-Baptiste Devlesaver est le fils de Philippine Martin (SOSA125). Jean-Baptiste est né en 1832 et décédé en 1910.
  • Philippine Martin est la fille de Pierre Joseph Martin (SOSA250). Philippine a vu le jour en 1802 et s’est éteinte en 1879.
  • Pierre Joseph Martin est le fils de Pierre Joseph Martin (SOSA500). Pierre Joseph est né en 1766 et est décédé en 1826.
  • Pierre Joseph Martin est le fils de Philippe Martin (SOSA1000). Il a vécu de 1741 à 1802.

Au cours de toutes ces générations, la famille s’est établie dans différents villages que j’ai replacés sur une carte, à la manière du geomapping que j’ai testé ici. Voici ce que ça donne :

Les flèches rouges indiquent donc les déplacements familiaux alors que les flèches noires indiquent à quelle épingle correspond chaque cadre. Vous voyez que pendant plusieurs siècles, ce côté de ma famille a vécu exclusivement dans le Brabant Wallon ; ce n’est pas le cas des autres côtés de ma famille, essentiellement originaires du Cambrésis, de la Botte du Hainaut et de la région de Herve.

Voilà. Je n’ai pas dû, comme d’autres, faire d’intenses recherches dans le but de trouver mon SOSA1000 : je le connaissais déjà. Il ne reste plus qu’à étudier chacun plus en profondeur, afin d’en savoir plus à son sujet et de reconstruire l’histoire de cette branche de la famille !

Le doc du mois

Suivant le conseil de Sophie Boudarel, je me lance pour la première fois dans un généathème. Il s’agit, en ce mois de février, de raconter l’histoire d’un document familial. Le document en question est tout choisi : il s’agit de la lettre d’amour de mon arrière-arrière-arrière-grand-père à sa future épouse.

Désiré Druenne est né le 5 juillet 1848 à Maurage, dans le Hainaut. Fils de Désiré Druenne et Virginie Alexandrine Parée, il est l’aîné d’une famille de 5 enfants. Lors de sa naissance furent témoins Désiré Desenfans, officier d’état civil, Désiré Druenne, son père, Philippe Dehon et énfin Félix Quertinmont. Désiré devient maçon.

Le 5 mai 1868, lors de la levée de 1868 à Maurage, il est engagé dans l’armée. Le même jour, il arrive à Anvers et est intégré au 6ème régiment de ligne, 2ème bataillon, 5ème compagnie, dans le fort 7, un des forts qui entouraient alors la ville. Aujourd’hui, le fort 7 a disparu ; le fort en lui-même a été démoli, et à sa place se trouve une réserve naturelle. Depuis le ciel cependant, on reconnaît encore nettement la forme caractéristique de l’ancien fort. Dans son carnet militaire, daté de cette époque, il est décrit comme haut de 1,61 mètre, vacciné en 1864, le visage long, le front haut, les yeux gris, le nez ordinaire, la bouche moyenne, le menton rond, et les cheveux et sourcils châtains. Dans ce même carnet, nous conservons précieusement le relevé de ses comptes et achats de matériel militaire entre le 7 mai 1868 et juillet 1873. Le 21 novembre 1868, six mois et demi après son arrivée, il devient caporal, et le 15 mai 1870, il est promu sergent. En 1870, il combat lors de la guerre en Belgique.

C’est au cours de son service militaire à Anvers que Désiré écrit un jour une lettre d’amour à celle dont son cœur s’était épris : Florence Carlier, surnommée Hortense.

Mademoiselle,

Vous direz peut-être que je prends beaucoup de liberté de vous adresser cette lettre, n’étant pas sûr qu’elle sera acceptée.

Vous savez Hortense que depuis longtemps mon cœur palpite en pensant à votre personne, malgré les disgrâces que je me suis accumulé à cause de vous.

Combien de fois le jour et la nuit je me suis dit : « Oh, si j’avais le bonheur d’être aimé d’une personne qui me paraît si aimable, telle que vous, il me semble que mon cœur serait soulagé d’une manière inexprimable.

Une chose que je voudrais c’est de me dire à la première occasion si vous avez un peu d’amour pour moi, oui ou non, il ne vous en faut pas beaucoup, si vous en aviez seulement la dixième partie de ma part j’en serais heureux.

Quand bien même ce serait non, mon amour resterait toujours attaché au même cœur que depuis longtemps aspire l’ardent.

Vous direz peut-être qu’il y a des garçons fous d’écrire à une fille étant sûr de ne pas avoir réponse.

Si toutefois cette lettre ne vous convenait pas, veuillez la brûler et me le faire savoir soit lors de mon retour soit dans huit ou quinze jours au plus tard.

Veuillez agréer mes sincères amitiés.

Druenne Désiré sous-officier au 6ème régiment de Ligne, au fort 7 à Anvers

L’écriture est gracieuse, le papier usé ; on peut croire que cette lettre charma le cœur de la belle, puisque le 1er mai 1878, âgé de 29 ans, Désiré épouse à Maurage cette demoiselle, âgée de 23 ans. Désiré et Hortense ont un fils, appelé Georges (1879-1931).

Le 23 mars 1898, à neuf heures du matin, Joseph Sclifet, 43 ans, garde champêtre et Joachim Cornil, 70 ans, tous deux voisins de Désiré, annoncent à l’officier de l’état civil de Maurage que celui-ci y est décédé la veille, le 22 mars 1898, vers 17h30, dans la section des Braicheux. Il était âgé de 49 ans. Son père, Louis, est à cette époque encore vivant, mais sa mère est déjà décédée. Son épouse, quant à elle, décède le 13 décembre 1930 à Maurage, âgée de 76 ans. On peut l’apercevoir seule sur la photo du mariage de son petit-fils Désiré Druenne (1904-1950), le 13 avril 1929.

Petits sauts et grands bonds

Suite à la lecture d’un article très intéressant sur le sujet, je me suis efforcé de faire du geomapping en retraçant sur une carte les chemins suivis par mes ancêtres au cours des siècles. C’est ainsi que, remontant ma branche patronymique, j’ai mis au point cette carte.

Comme on peut le lire ici, la branche de Druesne dont je fais partie est originaire de Forest-en-Cambrésis, un tout petit village du Nord de la France. Forest est très proche de Ruesnes, dont est originaire mon nom de famille. Je ne sais pas à quelle époque mes lointains ancêtres ont parcouru les quelques kilomètres qui séparent Ruesnes et Forest ; il semble cependant que cette époque soit très lointaine, car un certain Nicaise de Ruesnes est déjà mentionné à Forest en 1387.

À Forest, la famille est relativement riche ; assez, en tout cas, pour que mon ancêtre François Simon Druesne offre le 9 septembre 1692 à son fils Simon une propriété de grande taille, qui avait l’habitude de recevoir les souverains de passage dans la région, et qui existe toujours aujourd’hui ; il s’agit de la ferme de la Couronne (j’en parle ici). Pierre Druesne, le premier fils de Simon, quant à lui, hérite vraisemblablement d’une terre appelée La Lumerette (j’en parle aussi ici), qu’il revendra le 6 mai 1710, complètement ruiné.

Le petit-fils de Pierre, Jean-Baptiste (1725-1788), émigre vers 1747 à Maurage, à cinquante kilomètres de Forest, lors de son mariage avec Antoinette Bail. Tous deux sont à l’origine d’une grande branche de Druesne, qui adopte rapidement l’orthographe « Druenne » et qui occupa la région de Maurage pendant presque deux siècles. Le 13 avril 1929, cependant, Désiré Druenne (1904-1950) épouse à Lobbes Anna Briquet (1905-1971). C’est alors qu’il s’installe dans ce village près de Thuin, à proximité de l’église des Bonniers. Vers 1930, après la naissance de son fils Jacques, il déménage un peu plus loin, sur la route des Waibes, alors appelée route de Thuin, où il meurt le 23 septembre 1950. Jacques vivra dans cette maison pendant toute sa vie, et c’est en 2000 que Mary Reul, veuve de Jacques, revend la maison pour s’installer à Biercée, à quelques kilomètres de Lobbes.