Les Druenne de Threadneedle Street

C’est par intérêt pour les principes de la réforme protestante que le roi Edward VI et l’Eglise d’Angleterre « firent appel aux théologiens d’Europe, dont Jean a Lasco, baron polonais et prédicateur. Celui-ci, prévoyant l’intensification des persécutions religieuses sur le continent, et soutenu par Jean Calvin, intervint auprès de la Cour et de l’archevêque de Canterbury, Cranmer, pour obtenir la fondation d’une église des réfugiés (strangers church) »[1].

Le 24 juillet 1550, le roi publia une charte royale offrant la liberté de religion aux protestants de France, de Wallonie et des Pays-Bas[2]. Un important lieu de culte protestant fut alors fondé dans la chapelle des Augustins, et bientôt déménagée sur Threadneedle Street, au cœur de la City, dans les locaux de l’ancienne chapelle du St Anthony’s Hospital, qui prit peu à peu le nom de French Church (église française). Lorsque la reine catholique Mary Tudor vint au pouvoir en 1553, l’église fut fermée jusqu’à sa réouverture en 1560 , lorsque sa sœur, protestante, rétablit l’activité de l’édifice[3].

L’église française de Threadneedle Street telle qu’on pouvait la voir au 17ème siècle (Huguenot Society of London)

En 1562, les guerres de religion débutèrent en France avec le massacre de Vassy. Cet événement marqua le début d’une première vague de réfugiés français vers l’Angleterre[4]. Un siècle plus tard, les Druenne étaient sans doute aux premières loges lorsque la congrégation protestante française de Londres se déchira entre loyalistes et partisans de Cromwell à l’occasion de la guerre civile anglaise[5].

L’église protestante française de Threadneedle street, qui datait du treizième siècle, fut détruite une première fois lors du terrible Grand Incendie de Londres en 1666. Immédiatement après l’incendie, les huguenots construisirent une nouvelle église, qui fut terminée en 1669. Il s’agissait de l’une des premières églises à être rebâties.

Lorsqu’en 1685 le roi Louis XIV publia l’édit de Fontainebleau, révoquant de facto l’édit de Nantes, le flux de réfugiés huguenots augmenta massivement[6] : on estime qu’en 1700, environ 5% de la population de Londres était issue de cette émigration massive. Tous ces migrants apportèrent avec eux une panoplie de techniques et secrets de fabrication, ainsi que, dans certains cas, des richesses parfois considérables, qui permirent à Londres d’atteindre un niveau de développement jusqu’alors inégalé. Les huguenots y contribuèrent au développement des industries horlogère, bancaire, assurancielle, scientifique et artistique.

L’église de Threadneedle Street fut une nouvelle fois démolie en 1841, afin de faire place au Royal Exchange. Selon Henry Benjamin Wheatley, elle fut alors rétablie à St Martin’s-le-Grand, dans un édifice à son tour abattu en 1888 lors des travaux préparatoires de la construction d’un édifice des Postes[7].

Selon des informations obtenues des archives de la French Church, les généalogies et informations suivantes ont pu être reconstituées. Il est impossible de déterminer si les noms semblables ici relevés (Druane, Drue, etc.) sont bien des déformations du nom Druesne.

Le 17 août 1606, un certain Jean Druenne avait été témoin du baptême de Marguerite Cartenay, fille d’Antoine Cartenay et son épouse Péronne[8].

Le 7 juillet 1633, un certain Jacques Druenne fait baptiser à Londres sa fille Marie[9], puis, le 10 août 1634 et le 26 juillet 1635, deux autres des noms respectifs de Susanne[10] et d’Anne[11]. Il est vraisemblable que ces deux dernières soient décédées assez jeunes, puisque le 9 décembre 1638, le même homme baptise à nouveau une petite Anne[12], ainsi qu’une petite Susanne le 20 décembre 1640[13]. Etaient aussi nés Jacques, le 9 avril 1637[14], Marthe, le 1er janvier 1643[15], et David, le 9 août 1646[16]. La mère de ces deux derniers, et probablement aussi des premiers, était Susanne de Vienne. Le 22 mars 1635, enfin, Jacques avait été témoin du baptême de Jacques Maladrie, fils de Jean Maladrie[17], puis de celui d’Estienne Deladrier, fils d’Estienne et de Martine Fievez, le 5 février 1643[18].

Le 12 avril 1640, Annesse Druenne fut témoin avec Michel Degleberg du baptême de Michel Cheval, fils de Jean et Thonet Tournay[19]. Le 22 (ou 21) juin de la même année, Marguerite Drue, épouse de François Bourdeaux, fut témoin avec Jaq de le Vigne du baptême de Marguerite Barbieur, fille de Roland et Marguerite Marlier[20].

Le 27 juin 1641 fut baptisé à la French Church Jacques Drue, fils de feu Thomas (qui était originaire de Tournai, en Belgique) et de Marguerite Marchand (fille de feu Hugues Marchand), qui était quant à elle originaire de Hantonne, c’est-à-dire Southampton[21].

Le 5 février 1643, Jacques Druenne fut témoin avec « la femme de Nicolas » du baptême d’Estienne Deladrier, fils d’Estienne et de Marie Fieué. Le même Jacques Druenne fut témoin du baptême d’Esther et Marie Houriez, filles de Jean Houriez et Marie Le Roux, le 19 février 1654[22]. Par ailleurs, il est possible que les individus suivants soient tous des enfants du même Jacques Druenne, bien que cela soit difficile à prouver en l’absence des noms des mères de ces enfants :

  • Le 20 décembre 1640 fut baptisée Susane Druenne, fille de Jacques. Le nom de la mère n’est pas mentionné. Les témoins furent Gille Cantaine et Susane, « femme à Isaac » ;
  • Le 9 août 1646 fut baptisé David Druenne, fils de Jacques et de Susane de Viene. Témoins : Jaques Verrié et Juditch Verrié ;
  • Le 12 août 1649 fut baptisée Esther Drüenne, fille de Jacques et d’une mère non mentionnée. Les témoins furent Michel Pierguin et Esther L’Escaillet[23];
  • Le 30 juin 1651 fut baptisée Judith Druenne, fille de Jacques[24];
  • Le 2 juillet 1654 fut baptisée Elisabet Druenne, fille de Jacques et dont la mère est à nouveau omise. Les témoins furent Jean Lecarlieé et Elisabet Le Jeune[25];
  • Le 17 février 1661 fut enfin baptisée Marthe Druenne, fille de Jacques et d’une mère non mentionnée[26]. Les témoins furent Richard Dasse et Margueritte, épouse de Hugue Daniel.

Par ailleurs, une certaine Marte Druenne, fut témoin du baptême de Jean Posty, fils de Jean Posty et Anne Goufiliou, le 4 décembre 1681. Elle était l’épouse de Nicolas Allard, avec qui elle eut les enfants suivants :

  • Marte Allard, baptisée le 27 septembre 1668 – témoins : Daniel Rape et Martine Ruffin, femme de Jean l’Estocade[27];
  • Nicolas Allart, baptisé le 4 septembre 1670 – témoins : Abraham Stalar et Caterine Boulan, femme de Jean Miche[28];
  • Pierre Allard, baptisé le 6 octobre 1672 – témoins : Pierre Ferret et Marie Detry[29];
  • Jean Allard, baptisé le 23 février 1679[30];
  • Abraham Alar, baptisé le 16 janvier 1681 – témoins : Glaude Lequené et Susanne Boubay, femme de Pierre Ferré[31];
  • Charles Allard, baptisé le 8 juin 1684 – témoins : Charles Chasselle et Janne Deldeme, femme de Claude Eguiue[32].

Enfin, une certaine Aune Druenne fut baptisée le 2 janvier 1676 (témoins : Bon Jonson et Martenne Rufen, veuve de Jean Lestognart). Elle était la fille de Jaque Druenne et de Mary Lucas[33]. Il est possible que Jaque soit le fils de Thomas et Marguerite Marchand, qui avait été baptisé au même endroit le 27 juin 1641 (voir plus haut).

Le 9 juillet 1676, Antoine Damié, originaire de Valenciennes, épousa Marye Blondel, originaire de Canterbury, fille de Pierre et Marye Gourdon). Antoine était le fils de Jacques Damié et Marguerite Druane[34].

[1] French Protestant Church of London, « Le refuge huguenot à Londres ».

[2] La Charte d’Edward VI imposait à la communauté protestante de soumettre au roi les noms de tous les pasteurs pour approbation. Cette tradition, semble-t-il, persiste encore de nos jours, le French Pasteur étant le seul étranger à être appointé par la reine. Faute d’accès aux informations pertinentes, ceci n’a cependant pas été vérifié.

[3] French Protestant Church of London, « Le refuge huguenot à Londres ».

[4] French Protestant Church of London.

[5] French Protestant Church of London.

[6] French Protestant Church of London.

[7] Wheatley 1899 – référence inconnue.

[8] Huguenot Society of London, Moens, et Colyer-Fergusson, The registers of the French Church, Threadneedle Street, London, 63.

[9] Huguenot Society of London, Moens, et Colyer-Fergusson, 184.

[10] Huguenot Society of London, Moens, et Colyer-Fergusson, 192.

[11] Huguenot Society of London, Moens, et Colyer-Fergusson, 198.

[12] Huguenot Society of London, Moens, et Colyer-Fergusson, 222.

[13] Moens, The registers of the French Church, Threadneedle Street, London, 2:77.

[14] Huguenot Society of London, Moens, et Colyer-Fergusson, The registers of the French Church, Threadneedle Street, London, 211.

[15] Moens, The registers of the French Church, Threadneedle Street, London, 2:91.

[16] Moens, 2:106.

[17] Huguenot Society of London, Moens, et Colyer-Fergusson, The registers of the French Church, Threadneedle Street, London, 196.

[18] Moens, The registers of the French Church, Threadneedle Street, London, 2:92.

[19] Moens, 2:72.

[20] Moens, 2:74.

[21] Moens, 2:23.

[22] Moens, 2:134.

[23] Moens, 2:118.

[24] Moens, 2:124.

[25] Moens, 2:135.

[26] Moens, 2:159.

[27] Moens, 2:189.

[28] Moens, 2:196.

[29] Moens, 2:204.

[30] Moens, 2:231.

[31] Moens, 2:241.

[32] Moens, 2:269.

[33] Mary Lucas fut témoin du baptême de Jean Joson, fils de Bon et Jauana Haef, le 13 janvier 1678. L’autre témoin était Jean Miellé. Voir Moens, 2:218; 226.

[34] Moens, 2:55.