L’art floral est un art qui n’a pas encore vraiment acquis ses lettres de noblesse. Et pourtant, les amateurs de fleurs et de bouquets sont d’authentiques artistes, qui manipulent avec créativité des fleurs, qui les marient à des supports classiques ou saugrenus en vue d’une composition esthétique. Cet art subtil fait actuellement l’objet d’un cours, enseigné aux ateliers créatifs de Lillois par un maître en la matière, Mary Druenne.
Mary Druenne ne sait plus vraiment comment a démarré sa passion pour les fleurs. Elle a toujours été sensible aux bouquets qui font partie de son univers de femme. Rien d’étonnant dès lors qu’elle se soit intéressée à cette association d’amateurs de fleurs, réunis sous le nom de « Belgium Flowers Arrangement Society ». Les quelque deux mille membres de ce mouvement se retrouvent régulièrement lors d’expositions, de travaux communs (décoration de la cathédrale Sainte-Waudru à Mons l’été dernier, décoration de l’église du Sablon pour le mariage de la princesse Astrid…), passent différents examens pour accéder à des grades qui leur permettent d’enseigner l’art des fleurs… Bref, ils s’adonnent pleinement à leur hobby. Le respect des règles est primordial mais la consigne principale est la créativité. C’est ainsi qu’ils se laissent imprégner et influencer par les tendances du moment. Pour exemple, citons le style anglais, classique et touffu, lequel contraste singulièrement avec les modernes créations italiennes qui privilégient la sobriété et le dépouillé. Le style belge s’en rapproche d’ailleurs énormément. L’art floral en Europe n’est pas étranger à la tradition des bouquets japonais : il s’en inspire tout en faisant abstraction de cet aspect statique et traditionnel, propre aux Japonais.
Au départ, tous les bouquets étaient catalogués dans le genre classique, régis par des règles très strictes : respecter un nombre impair de fleurs ; présence d’un point focal ; jamais deux fleurs à la même hauteur… Le bouquet moderne n’attachait par contre pas d’importance à la quantité de fleurs. Il variait à l’infini les supports (souches, coquillages, vannerie, fer à repasser…). C’est l’esthétique qui doit primer, la technique étant seulement considérée comme un outil.
Les hommes aussi
Et cette créativité peut se manifester de multiples façons, comme l’explique Mary Druenne : Cette semaine, j’ai eu une idée de génie en trébuchant sur un treillis de poule. Je l’ai convenablement enroulé et j’y ai accroché des grappes de fruits, des entrelacs de fleurs. C’était superbe ! Chaque année, avec mes élèves je crée une crèche. Il suffit parfois d’une souche en forme de bois de cerf pour composer, fleurs et boules à l’appui, une ravissante crèche de Noël. Pour éviter les traditionnels problèmes d’épines de sapin, je fabrique chaque année mon sapin : des sapins de carton posés de biais qui sont décorés de masses de boules argentées. Une bougie gigantesque traverse la composition de part en part tandis que des feuilles argentées jaillissent des pieds de ces conifères. Vous savez, c’est tellement facile de s’exprimer avec des fleurs et cela touche toujours le cœur des gens. Pour les cadeaux de fin d’année, je réalise notamment autour du goulot de la bouteille de whisky une légère composition fleurie qui personnalise le cadeau.
Les cours d’art floral s’adressent aussi bien aux hommes qu’aux femmes : l’esthétique s’apprend, l’harmonie des couleurs et des formes aussi. Mes élèves comprennent rapidement quel genre de bouquet convient pour un buffet haut ou pour une table basse ; quelles couleurs associer à une pièce foncée ou claire. Il y a une règle d’or à ne pas oublier : petite fleur, petit vase et petit bouquet !
Les ateliers créatifs de Lillois où se déroulent les cours d’art floral en sont déjà à leur septième année d’enseignement. Certains amateurs particulièrement assidus se sont aujourd’hui spécialisés. C’est pourquoi Mary Druenne donne à la fois des cours d’initiation et des cours de perfectionnement. Elle-même se perfectionne chaque semaine auprès de spécialistes étrangers et belges.
L’exotisme a la cote
L’art floral est un hobby qui ne coûte pas les yeux de la tête. Les cours, divisés en trois semestres, ont lieu tous les 15 jours. Il suffit d’y amener ses fleurs, son support, quelques accessoires tels que de la mousse en brique et le tour est joué. Le premier cours débute avec une composition de trois fleurs, puis l’on varie à l’infini avec des plantes sophistiquées que l’on se procure chez son fleuriste ou au marché, avec des fleurs des champs ou de jardin que l’on cueille tout simplement. Ces cours vont de pair avec une profonde solidarité au sein du groupe. Certaines personnes ramassent dans leur jardin quantité de feuillages et d’herbes, qu’elles distribuent ensuite aux autres. Je pense également que les fleurs ont un rôle social : bien des personnes motivées par leur composition sortent de chez elles pour aller ramasser de la verdure ; c’est un but dans leur journée : elles se sentent moins seules et sont moins enclines à la mélancolie. Quand on s’intéresse aux fleurs, on se surprend à regarder la nature autrement, la moindre mousse ou le plus petit champignon attire le regard et l’admiration. Finalement, on pense les fleurs du matin au soir, on cherche avant de dormir la composition la plus esthétique, on s’amuse en faisant la vaisselle à imaginer des bouquets audacieux… Les fleurs vous transforment la vie.
Comme tout art qui se respecte, les bouquets ont des noms évocateurs à souhait : le Médicis est un bouquet triangulaire qui ne se conçoit que dans un vase Médicis. L’Hogarth (du nom d’un peintre) à la forme d’un S, c’est un bouquet situé à la transition de l’ancien au moderne. La composition De Vucht ne prévoit aucune ligne de biais : les fleurs doivent être dressées et seule la verdure peut être placée horizontalement.
Ces noms sont souvent assortis de tendances voire de modes, dont il est difficile de déterminer les origines : Beaucoup de personnes détestent les œillets en boutonnière car ils ont la réputation de porter malheur ! Ils n’ont d’ailleurs plus la cote actuellement. Les fleurs exotiques sont par contre de plus en plus appréciées ; elles s’accompagnent de feuillages étranges et décoratifs comme ces fines herbes à ours. Il faut encore tenir compte de cette multitude de nouvelles fleurs crées par la main de l’homme et qui n’ont pas fini de nous séduire !
Note : Les stages d’initiation débuteront le lundi 23 janvier à 19 h 30 et le jeudi 26 janvier à 10 heures. Les cours de perfectionnement seront donnés à partir du jeudi 26 janvier à 19 h 30. Pour les inscriptions, s’adresser à Monique Rémy, 337, Grand-Route, à Lillois (Braine-l’Alleud). Tél. : 02-384.41.61.
Des p’tits trucs…
L’art floral ? Une question d’esthétisme, bien sûr, mais aussi une quantité de p’tits trucs techniques, qu’il faut absolument maîtriser pour ne pas abîmer les fleurs lors des manipulations, pour ne pas voir flétrir les superbes montages le lendemain même de leur composition. Mary Druenne, pas avare pour un sou de petits conseils utiles et pas compliqués, nous en dévoile quelques-uns.
Mais avant tout, elle insiste sur les précautions qu’il faut absolument prendre avec certaines fleurs : Quand vous manipulez des bouquets, faites bien attention de ne pas frotter vos mains dans les yeux, de ne pas sucer votre pouce… Les allergies ou empoisonnements vous guettent. N’oubliez pas de vous laver consciencieusement les mains.
En ce qui concerne les fleurs proprement dites, il faut savoir que chacune d’elles a droit à son petit traitement de faveur. Vous recevez des roses, l’une d’elles incline la tête, plongez-la rapidement dans un fond de baignoire. Couchée de tout son long, elle reprendra vie. Pour les tulipes, agissez autrement : commencez par couper l’extrémité blanche de la tige et serrez le bouquet dans un papier journal, laissez-le ensuite reposer une nuit entière les pieds dans un seau d’eau. Si cette opération vous semble trop longue, traversez d’une aiguille la tige de la tulipe juste en-dessous de la fleur. Le Gerbera que l’on achète, la tige dressée par un fil de fer, ne supporte pas que l’on coupe ses extrémités sauf si cette opération se fait sous le jet d’eau car la plante aspire alors une grande bouffée d’eau !
Venons-en au lilas. Première chose : débarrassez-le de toutes ses feuilles, puis coupez la branche de biais et martelez-la. Dans les champs, ce sont plutôt les pavots et les coquelicots que l’on croise. Ces plantes sitôt cueillies, perdent toute leur sève et flétrissent immédiatement. Que faire ? La cautérisation est la seule solution.
Les fleurs à sécher nécessitent un traitement spécial : fraîches, elles seront suspendues la tête en bas dans un local obscur et sec. Et le tour est joué ! Mais ne vous aventurez pas à sécher un bouquet de mariée. Ce dernier doit faire l’objet d’un traitement spécial et assez compliqué sous peine de perdre tout son éclat et de tomber en miettes au bout de quelques années. Voilà donc quelques petites idées. Si le sujet vous intéresse, il ne vous reste plus qu’à vous inscrire aux ateliers de Lillois…
Source : Burny, « L’art des compositions florales est accessible à tous avec Mary Druenne ». Le Soir.